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Lieux #8

Du bois avant qui meurt donc dans l'étang, s'y mire tel un malade amant, on peut dire encore qu'on y trouve une poignée de maisons en ruines dont les murs effondrés, les briques mangées, sont un mystère hantant qu'on entrevoit de la route. Il arrive que des promenades dominicales, des errances de mercredi aussi, y mènent. On approche, la conversation faite jusque-là de rires, d'éclats de voix, se calme, diminue son volume sans que rien, vraiment, ne l'explique. Peu à peu, sans y prendre garde, on ne le remarquera qu'en repartant, quand on reviendra à la normale, on se met à chuchoter et dans l'oppressante immobilité des arbres bientôt il n'y a plus que les craquements mous des branches mortes pourries dessous les pas. On entre. Il n'y a plus de toits. Les fenêtres découpent dans le gris rouge des cloisons des yeux aveugles ou presque qui clignent comme le vent à peine perceptible de l'autre côté fait remuer des branches vertes. Dans les coins, des amas de gravats achèvent de fondre. On ne sait pas ce que c'était, on préfère ne pas traîner, on s'éloigne finalement rapidement, retrouvant à quelques mètres un chemin qui va tout droit débouchant sur le ban sans doute d'un autre village, et pour cela on ne le suivra pas. Derrière nous, les maisons mortes qu'on abandonne restent debout et dignes, ne racontent rien, ne cèdent pas. On imagine.