La dispense #10
Sur ce chemin de croix, il y a comme il se doit quelques stations, c'est ainsi que la tradition dont j'ai souvenir nomme les étapes que l'autre a fait vers sa mort cloué sur ses bouts de bois, et l'une c'est la séance de gymnastique, ce moment pathétique où deux heures durant il s'agissait de courir sur des poutres, et bien sûr en tomber, se pendre à des anneaux, et bien sûr en tomber, grimper à la corde qui rugueuse jamais lissée nous arrachait les paumes, et là-aussi tomber, heureusement, de pas très haut, je ne suis jamais monté vraiment haut, la corde ne voulait pas de moi, mes mains ne tenaient pas, mes pieds ne faisaient pas le geste qu'il fallait pour bloquer ce serpent et s'appuyer dessus, et puis encore, rouler sur des matelas puants, et se faire mal partout, tenir à l'équilibre, et manquer de tomber, sauter sur des tremplins pour atteindre aux chevaux d'arçon, et presque à chaque fois n'arriver pas suffisamment rapidement pour finir par se cogner dans le bord dur, le cuir tanné, parfois à peine, un ou deux fois tellement fort, le ventre encaissant tout, les testicules aussi, qu'on repartait plié en deux de douleur comme de honte sous les quolibets des copains dont le tour viendrait, ça consolait un peu, nous étions à la file [...]