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La dispense #5

Alors ce jour-là, celui du tout premier plongeon, les choses se sont passées ainsi dessous la piscine-bulle qui ne s'était pas encore envolée, ce qui arriva pourtant quelques années plus tard, je n'étais plus dans la région mais tout le monde avait parlé de cela, un orage dantesque et les vents qui viennent avec et harcèlent tellement cette structure qu'à un moment tout lâche, la bâche qui fait la bulle s'envole, enfin, au vu du poids, elle arrache ses attaches et détruit ses fondements puis s'en va molle rampante sous les bourrasques folles telle une limace énorme jusqu'à atteindre les arbres de la forêt toute proche pour s'y emmêler, on la retrouverait ainsi, déchirée totalement et embrassant les chênes immenses dans un baiser désespéré, il me semble que cela marqua le début d'une longue période de fermeture, peu importe puisque là, à cette heure, le petit groupe que nous sommes de ceux qui ne savent pas nager a été séparé de ceux, les rares, qui savent, ou le prétendent, et il ne sert à rien de ne pas même répondre à la question, le doute ne nous bénéficie pas et ceux qui restent silencieux, le regard fixé sur leurs pieds nus, finissent quand même dans le groupe des maudits, le groupe des non-nageurs qu'à présent, le maître-nageur entraîne vers le plus grand des deux bassins, le plus profond, je vois inscrit au bord la profondeur, je l'ai maintenant oubliée mais je me souviens bien de mon effroi d'alors à remarquer que c'était bien trois ou quatre fois ma taille, et vers le bas encore, sous la surface, une sorte d'abysse, un invisible trou avec ses yeux de traître ne vous regardant jamais bien en face, quelque chose qui pourrait tout autant être sans fond que ça serait pareil, pour moi, et pour les autres du groupe dont les visages sont devenus blancs comme craie, le maître-nageur, sanglé dans son slip comme s'il allait au combat, nous détaillant à présent la suite prévue des opérations, qui n'était pas pour nous rassurer.