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Fossile #19-1

On pourrait s'être trompé, du début à la fin : quelqu'un aurait trouvé l'image dans ces paquets de vieux clichés fatigués sur lesquels on tombe immanquablement dans toute brocante qui se respecte, qui suit la codification de ces moments voués au partage des choses, on écrirait partage des morts que ce serait plus proche de ce qu'on ressent à chaque fois, on évite soigneusement de s'y retrouver, ça pue la mort entre ces rangs de vaste fatras mais là imaginons une main qui fouille dans un amas s'arrête repose et puis reprend son malaxage du hasard jusqu'au moment où c'est ce bambin-là qui apparaît retenant la main et l'attention regarde on dirait bien au dos il n'y a rien mais oui on dirait bien on glisse au vieux marchand deux ou trois sous on rentre il se faire tard l'heure de dîner on en discutera la prochaine fois on rit arrive un autre dimanche on honore l'invitation on montre à la maman l'étrange cadeau elle compare les bambins le sien jouant dans son carré et l'autre sur le papier debout il y a certes une ressemblance mais rien de plus elle le sait bien disons les mains peut-être les genoux c'est beaucoup dire un rien dans l'oeil on rit encore on griffonne pour s'amuser sur le dos cartonné le prénom du bambin du vrai le mien en somme on range le tout dans une boîte trop emplie déjà et on oublie tout ça le repas l'amusement les quelques lettres de crayon et des années plus tard on croit vraiment et moi avec que le cliché dessus c'est moi mais en fait non, c'est quelqu'un d'autre, imaginons, qui est-ce donc, on peut rêver, tout serait faux, quelle folle histoire, et quel doute.