Aller au contenu principal

Trente-trois tours

Trente-trois tours

Les carrés ainsi de carton s'entassent lentement dans la bibliothèque montée de solides planches fixées à même le mur sans doute encore indifférentes quand on ne sera plus que souvenirs allongés là-bas dans le cimetière qu'on voit si bien depuis la fenêtre du toit avec ses six tilleuls montant leur garde sur les vivants les morts c'est presque même chose la différence est dans le presque, on se couche le soir avec un casque qui sera un compagnon si longtemps que la mousse de ses oreillettes finira par se défaire toute seule dissoute grignotée par les petites dents sans pitié des jours, on s'endort par à-coups avant le grand plongeon dont on ressort ébahi, on retrouve cette sensation de lutte contre la nuit connue déjà dans l'autre chambre quand somnolant l'oreille collée contre un minuscule transistor accroché caché le jour aux ressorts du sommier sous le matelas on ne distinguait plus la réalité d'un ailleurs gorgé de riffs vengeurs des pas lourds des cauchemars, on continue à défricher les hirsutes échevelés tatoués en sautant un peu au hasard dans des inconnus oubliés pour certains sitôt l'album trouvé acheté ramené du donc supermarché, on cherche une révélation qui serait celle de nous mais rien bien entendu ne vient et les semaines coulent nous emportant toujours plus incertains malgré le blouson noir les cheveux longs cette colère qui monte et ne retombera pas.