Aller au contenu principal

Murs #2

Murs #2

(...) jusqu'à ce que le père excédé qui s'était tenu jusque là droit et digne auprès de sa femme décide dans un sursaut que ça suffisait et qu'il faudrait bien qu'on en finisse que la chose morte qu'était devenue sa fille sorte de cette maison aille pourrir ailleurs se détache d'eux les laisse vivre ce qui n'arriverait pas malgré tous leurs efforts ce qui fait que des années et des décennies après ils (les parents) en parleraient encore en toute occasion à croire qu'elle n'était pas morte et qu'elle allait à un moment ou à un autre descendre l'escalier confirmant que les craquements qu'on entendait à l'étage c'était bien elle qui marchait dans sa chambre et pas le bois les madriers du plancher qui gémissaient à mesure des changements de température de saisons d'heures de la journée et donc lui avec son béret à la main semblant soudain entrer dans une de ces colères sans bornes qu'on lui connaissait tendant le bras d'abord timidement puis plus franchement et posant sa main sur le bois à peu près là où devait se trouver de l'autre côté de la planche la tête sans vie commençant à pousser aussi naturellement que s'il s'était agi de dégager un tracteur de la boue commençant à pousser de plus en plus fort à s'arc-bouter les porteurs ne comprenant d'abord pas ce qui se passait puis prenant la mesure n'osant pas protester n'étant pas chez eux n'étant pas le père de la morte étant sans doute aussi un peu soulagé que quelque chose se passe qui pourrait les sortir du ridicule de la situation le père ne cessant pas sa poussée semblant avoir perdu toute retenue maintenant posant son couvre-chef sur la boîte pour libérer sa seconde main être plus à l'aise