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Oraison

Poussée la grille grinçant de toujours il y a une grotte faite de bric de broc avec ses trois statuettes hautes dont les pierres mangées tiennent à plâtrées de béton jeté là large de pleines mains quand des plantes dont je ne sais le nom recouvrent tout lentement d'un voile gras verdâtre cependant que la pluie, le vent, le gel toujours rongent les blocs peut-être de granit pourtant friables (ce qui ne laisse pas de m'étonner) lorsque tout autour les jardins s'emplissent des silhouettes pliées les peuplant tant qu'on peut, c'est à dire avant que le ciel mercure gris ne tombe sur les têtes, les âmes, les corps, les choux, les carottes, les patates, pour les pourrir puis les figer des mois durant dans une immobile attente morte crevée parfois de l'éclaircie blanche d'une averse de neige ou d'une corneille frôlant le sol avant de repartir narquoise se poser sur la branche la plus grosse d'un arbre réduit à ses seuls bras, on dirait ça, des hommes tombés et toujours droits dans le lointain à attendre on ne sait pas trop, personne ne peut plus rien pour eux, et même pas les statuettes dedans la grotte qui sont en pleine prière, drapées de voiles blancs et bleus, les mains jointes parfaites, le regard extasié devant l'apparition qui pourrait bien être un rêve et qui est une petite chose sculptée de plâtre certainement haute comme ça...