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Cinquante #26

Le bruit d'abord de loin d'en haut hurlant du moteur tout acier une rage passant dans même pas le temps de dire et juste après un cri tout un freinage, il fallait bien, en bas c'était le Stop quand on touchait la fourche, on attendait, on entendait de l'autre côté la remontée à pistons fous et puis encore devant ils repassaient, dix fois par jour, des traits cuirs noirs motards, l'oncle racontait comment l'un d'eux déjà s'était tué dans cette ronde, le Stop grillé, le crash tout droit, cela nous faisait le souper, c'était la maison de l'été, semaines de rien, semaines lentes où j'occupais l'appartement de l'étage vide avec ses collections de Rustica, Reader's Digest feuilletées sur le parquet, des jeux olympiques en entier sur le téléviseur d'en bas accompagné de l'oncle toujours à s'agiter en m'expliquant, je ne comprenais rien, il sautait sur sa chaise aux fins des courses, des choses cuisaient dans la cuisine grande comme une main, un cousin une année ou deux était venu aussi, les heures passées dans le cerisier à se gaver tels des oiseaux, y monter par le toit du garage qu'il couvrait, les plaques ondulées grises de mousses, ce temps tellement particulier qu'enfilent juillet et août, cela faisait une seule très longue journée où plus rien n'arrivait.

Il n'y a plus de cerisier et je crois bien que cet immeuble avant c'était un terrain vague où il n'y avait pas droit de jouer, la bâtisse grise fermée plus haut un magasin de meubles en bois, pour la maison elle reste la même, nous n'entrions jamais devant, il fallait prendre entre mur et garage pour aller de l'arrière avec trois marches pour le petit balcon et à côté les trois qui descendaient c'était juste vers la cave faite de quatre petites pièces parfum salpêtre, cette porte avant avec sa marquise colorée je crois ne l'avoir jamais empruntée, et l'oncle et puis la tante pour eux ils sont ailleurs, dans la grande plaine venteuse de ma mémoire, je les revois souvent qui marchent dans notre très grand été.