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Tombeau #3

Tombeau #3

Le vrai point de départ a sans doute été là-haut dans la bâtisse longue et basse, un vrai pâté avec sa cour de bitume comme il se doit, toute école a sa cour et la cour demeure même si maintenant l'école n'en est plus une qui a été fermée d'abord à la faveur d'un regroupement avec ses voisines, est restée vide longtemps telle que,ses petites chaises alignées, ses armoires fermées sur toutes leurs merveilles, on les voyait endormies depuis dehors en se perchant de quelques orteils sur le minuscule appui que fait le bas bout du mur quand il se raccroche au restant de façade, je peux parler au présent, je pense que ça n'a pas changé alors qu'ensuite, dedans, le vide est arrivé et puis quelques travaux et puis voilà, l'école était devenue une salle communale propre nette carrelée dans laquelle ceux et celles qui avaient ici appris leurs premiers mots penchés sur de minuscules pupitres vident maintenant leurs derniers verres tout en chantant et avalant le long de tablées gigantesques des repas gargantuesques, je me demande toujours qui se souvient qu'ici avant nous étions des enfants et eux aussi, il n'y a plus de tableau et ça ne sent plus l'encre et la maitresse n'entrera pas qui est morte vive en cognant dans un arbre avec une voiture devenue folle, ce devait être pile après que nous ayons été voisins ou tout du moins dans la même classe, et toi, et moi, pendant la communale, c'est un souvenir vague, tu étais dans le rang derrière, tu ne parlais pas, je crois bien que tu es le tout premier taiseux que j'ai croisé et moi qui suit bavard dedans mes mots, cela vraiment, ça m'épatait.