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Draps

(...) comme ces vies qu'on retrouvait entre les draps empilés par brassées glissées là oubliées là cachées peut-être là par les femmes qui confiaient ainsi au silence des armoires ce dont elles ne pouvaient pas parler ne voulaient pas se souvenir ne voulaient pas oublier et qui prenait figure de photographies de lettres de mèches de cheveux enroulées lovées dans des sortes de médaillons infiniment ciselés de dents de lait de rubans de tout de riens qui tombaient sur le sol quand on faisait le ménage d'après mort d'avant vente qu'on ramassait un peu inquiet de ce qu'on allait découvrir qu'on tournait retournait entre ses doigts sans vraiment comprendre ce qu'on avait exhumé qu'on posait sur le lit en se demandant ce qu'on allait en faire qu'on emporterait longtemps avec soi un peu partout dans sa propre vie indifférente on le croyait au temps sans parvenir à s'en défaire, se disant régulièrement qu'il fallait tout de même jeter ça et puis ne le pouvant réellement pas, l'oubliant dans quelque carton, un recoin, jusqu'au jour où le cycle reprendrait, et ainsi toujours, à moins qu'un, brisant le charme, apportant ça à un brocanteur dont la vitrine finirait par exhiber, revenu de tout, tout ça, libère les choses de nous.